Fête du cinéma d’animation 2023

On ne va pas se mentir, cette manifestation peine à convaincre de son intérêt au-delà d’un microcosme d’initiés et ne cesse, faute de moyens, de réduire son périmètre de rayonnement. Peut-être s’essouffle-t-elle un peu beaucoup ? A moins qu’elle ne souffre d’un sérieux manque d’ancrage territorial entretenu à longueur d’année…
Une situation paradoxale si l’on considère que le cinéma d’animation n’a jamais été aussi visible médiatiquement et plébiscité par les publics, de plus en plus affranchis de l’alibi des enfants à accompagner.
Quoi qu’il en soit, ici on continue de la soutenir, indéfectiblement depuis la toute première édition en 2002.

Consultez le programme des différents événements associés à cette 22e Fête du cinéma d’animation organisée par l’Association Française du Cinéma d’Animation, pour vous faire une idée.

Quatre longs métrages à ne pas manquer

Le dernier trimestre de l’année civile étant traditionnellement très chargé en sorties “cinéma animé”, voici une nouvelle sélection de quatre longs métrages à privilégier. Certes, ces deux premiers étaient déjà mentionnés en mai dernier. Mais, quand on aime, on ne compte pas.
Ces quatre œuvres partagent plusieurs points communs notables :
– ce sont toutes des dessins animés et les têtes de nœud qui avait décrété la mort de l’animation voilà plus de 15 ans devraient faire profil bas ;
– à l’exception de l’incontournable “énième-ultime-nouveau chef d’œuvre” 😉 de Miyazaki, ils sont tous français et néanmoins, chacun à leur manière, innovants ;
– ils démontrent unanimement la puissance visuelle et narrative des dessins en mouvement pour stimuler les imaginaires collectifs et sonder les sentiments humains les plus profonds et les plus universels.

Linda veut du poulet est à plus d’un titre un tour de force réalisé à quatre mains par Chiara malta et son compagnon Sébastien Laudenbach.
Cette comédie socio-mélodramatique au parti pris esthétique qui pourra semblé original aux spectateurs qui ne connaîtraient pas – honte sur eux ! – les films précédents de Sébastien Laudenbach, comme La jeune fille sans mains, au hasard. Enfants, jeunes adultes, parents, cinéphiles dans la force de l’âge, retraités, vous serez forcément emballés par l’humour, la tonalité, le rythme, le souffle libertaire et l’évidente humanité de ce film, prédestiné à devenir un classique.
> la bande-annonce
Sortie en salles le 18 octobre 2023

• L’événement est planétaire et attendu comme le messie, Le garçon et le héron, dernier long métrage réalisé à 81 ans par Dieu en personne déboule en France dans moins d’un mois.
Mince ! Ce n’est pas un film pour enfants !
Chouette ! C’est une œuvre magistrale, complexe, déroutante, spectaculaire, testamentaire (mais on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise avec Dieu) adaptée très très librement d’un classique de littérature japonaise “Et vous comment vivrez vous ?“, dont nous recommandons très très très très très très vivement la lecture.
> la bande annonce
Sortie en salles le 1er novembre 2023

• Pour son premier long métrage, Jérémie Perin (Last Man) signe avec Mars Express un petit bijou de science fiction spéculative qui fleure bon les grandes heures du cyberpunk. Il faut remonter au Gandahar de René Laloux (1987) pour trouver une production française* pour le cinéma arborant fièrement et qualitativement une même ambition de redonner à la science fiction ses lettres de noblesse animée.
> la bande annonce
Sortie en salles le 22 novembre 2023

• Longtemps dans le giron de Folimage et complice de quelques-unes de ses meilleures productions (Ma petite planète chérie, Patate et le jardin potager, …), Benoît Chieux réalise désormais ses propres films lesquels affirment peu à peu un style singulier d’une richesse visuelle aussi insolite qu’attachante dans le paysage de la production française de dessins animés pour enfants.
Sirocco et le Royaume des courants d’air en surprendra plus d’un.e par son inventivité de tous les plans.
> la bande annonce
Sortie en salles le 13 décembre 2023

* Le très oubliable et oublié Renaissance de Christian Volkman (2006) recourait exclusivement à l’animation 3D et Avril et le monde truqué de Franck Ekinci et Cristian Desmare (2015) relèvait plus de l’uchronie rétrofuturiste que de la science-fiction pure.

Mieux vaut tard que jamais

L’information a mis le temps pour remonter jusqu’au cerveau mais on y arrive enfin ! Quelle découverte ! Les films de dessins animés peuvent constituer un outil de communication et de soft power surpuissant, à condition qu’ils soient bien produits, fabriqués avec un savoir-faire solide et un minimum de sincérité (ce dernier point étant probablement le plus important) !
Nous mentionnons ici même, depuis plusieurs années déjà, les films publicitaires “légèrement exagérés” valorisant les patrimoines de l’état de l’Oregon (émanant en partie des talents français du studio Sun Creature) comme les emblématiques exemples de campagnes d’attractivité territoriale au rayonnement mondial assuré.
En 2022, nous nous “félicitions” même de la participation financière de notre région pour pouvoir figurer dans cette publicité japonaise pour le groupe LVMH.

Aujourd’hui, c’est au plus haut niveau de l’État que les dessins animés sont appelés à la rescousse pour valoriser les atouts de la France.
Mais attention, pas avec le style de Michel Ocelot ou de Jean-François Laguionie, faudrait pas pousser Mémé dans les orties non plus.

Les professionnels intéressés pour postuler sauront où se connecter pour répondre à ce marché opportuniste.
Quant aux grognons amateurs d’animation japonaise qui se souviennent encore du “monde d’avant” dans lequel le seul terme de “japanim” valait disqualification, qu’ils ricanent et rancunent autant qu’ils veulent.

Le marché de l’animation en 2022

Marronnier du printemps agonisant, voici la synthèse annuelle des “Tendances du marché de l’animation française” (53 pages) que vient de publier le CNC (Centre National du Cinéma et de l’image animée).
Et nous, à Normandie Animation, aimons bien relayer ce non-événement comme on lance une bouteille à la mer, en espérant – l’espoir fait vivre – qu’il tombe entre des yeux intéressés pour en saisir l’essentiel : un marché dans une forme insolente, des chiffres de l’emploi en hausse et toujours pas le moindre bénéfice pour le territoire normand, faute de soutien et d’accompagnement digne de ce nom au développement de notre filière et à l’implantation de structures désireuses de quitter le noyau parisien sur-pollué.
Néanmoins, réjouissons-nous pour les autres régions et territoires d’outre-mer qui récoltent avec satisfaction les fruits de leurs investissements. Le ruissellement, ça existe vraiment. Demandez-leur.
Et répétons, encore et encore, aux jeunes professionnels et aux parents circonspects d’adolescents désireux de s’orienter dans les innombrables métiers du secteur de la création animée : foncez pendant qu’il est encore temps !

Pour celleux qui détestent lire (comme on les comprend) ce type de prose, consultez ici la synthèse de la synthèse (9 pages)

 

Grand prix du long métrage Annecy 2023

Consécration logique – et sans surprise pour ceux qui ont su voir dans La jeune fille sans mains (2016) l’émergence d’un cinéma français d’animation de long métrage innovant et mature – consécration donc pour Sébastien Laudenbach et sa compagne Chiara Malta, qui viennent de remporter le Cristal du long métrage lors de l’édition du Festival International du Film d’Animation d’Annecy qui s’est clôturée samedi dernier.
Le film sortira en salles le 18 octobre prochain. Ne le manquez pas !

Consultez l’intégralité du palmarès d’Annecy 2023

 

Palme d’or 2023 du court métrage

Qui a dit que le cinéma d’animation n’était pas assez représenté et valorisé à Cannes cette année ?
La Palme d’or du court métrage (tous registres confondus) a été attribuée au sublimement désenchanté 27 de Flóra Anna Buda.

On notera – sans arrière pensée aucune 😉 – que ce court métrage hongrois a été coproduit par les français de MIYU, avec le soutien d’Arte France (où il sera diffusé à partir du 10 juin), des régions Centre-Val de Loire (via Ciclic) et Nouvelle-Aquitaine (via Magélis).
A bon entendeur…

 

 

 

 

 

 

Quatre longs métrages à ne pas manquer

Une fois n’est pas coutume, voici une nouvelle alerte pour signaler la sortie à court et moyen termes de quatre longs métrages dont l’exploitation pourrait être relativement compliquée par leur forme singulière, leurs sujets originaux, leur évident anti-conformisme, et bien sûr par une concurrence sévère d’œuvres – japonaises et américaines à venir – plus consensuelles et à plus grand rayonnement médiatique.
Autrement dit, Normandie Animation prend position pour ces productions innovantes à plus d’un titres qui honorent, chacune à leur manière, le grand art du cinéma d’animation d’auteurs.

• Le 7e long métrage réalisé par la cinéaste roumaine surdouée Anca Damian. L’île est un film hybride, expérimentale, engagé, d’une force poétique indéniable. Il devrait cependant passer inaperçu. L’île fait partie de ces œuvres, comme Archipel l’année dernière, qui repoussent les limites visuelles et narratives du cinéma d’animation et ouvrent de fait de nouveaux horizons aux spectateurs lassés par les formats conventionnels. Encore faut-il prendre le risque d’aller jusqu’à la salle de cinéma pour le comprendre pleinement.
> la bande-annonce
Sortie initialement annoncée le 3 mai 2023 et reportée au 7 juin 2023

• Sorti aux États-Unis en 2022, passé de peu à côté de l’Oscar en février dernier, le phénoménal Marcel, The Shell With Shoes On est un petit miracle ! Drôle, fédérateur, émouvant et surtout magistralement écrit/réalisé/mis en scène/animé/dialogué/monté/produit, i plus, ni moins, il est LE long métrage d’animation à ne pas manquer cette année. Celui qui vous marquera très longtemps, que vous soyez enfants (de grâce n’ayez pas peur de la V.O sous-titrée, vous serez récompensés par la performance de jenny Slate !) ou adultes, jeunes ou vieux.
> la bande-annonce
Sortie le 14 juin 2023

• La star de la prochaine Fête de l’animation en octobre sera incontestablement Linda. Elle veut du poulet et finira par l’avoir. Quoi que.
Le deuxième long métrage de Sébastien Laudenbach (Le jeune fille sans mains) est coréalisé avec sa compagne, Chiara Malta. Il se trouve que ce beau projet au long court a été soutenu à la réécriture par la Maison de l’Image de Basse Normandie, voilà plus de douze ans. Le règlement de cette agence régionale, remplacée par Normandie Images depuis 2018, permettait alors à des projets sans liens avec la région d’être soutenus. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Un ange passe.
> un extrait et un autre extrait et encore un autre extrait, à défaut de bande-annonce
Sortie annoncée le 18 octobre 2023

• Très attendu, peut-être trop, par les geeks de l’animation sensationnaliste, le premier long métrage de Jérémie Perin (Last Man) s’intitule Mars Express et devrait être l’autre événement animé de l’automne. Événement si toutefois il tenait ses belles promesses – auxquelles nous voulons croire volontiers aujourd’hui – d’un retour des dessins animés de science fiction, dépoussiérés depuis René Laloux et Jean Chalopin, et ouverts sur de nouveaux imaginaires. Verdict fin-novembre.
> en attendant la bande-annonce, un extrait du film
Sortie annoncée le 22 novembre 2023

 

Pendant ce temps-là à Cannes

C’est en pleine 76e édition du Festival de Cannes que Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la Culture, a présenté ce vendredi 19 mai 2023, les lauréats de l’appel à projets « La grande fabrique de l’image » de France 2030.
Ce plan d’investissement à hauteur de 350 millions d’euros est fléché en direction de studios de tournage (vues continues et animation), d’unités de production d’effets spéciaux et de jeux vidéos, et d’organismes de formation aux techniques de l’imagerie (de l’écriture à la post-production).

Le signal est fort, l’annonce historique, oui “historique”. Il témoigne – enfin – d’une prise de conscience au plus haut niveau des enjeux et bénéfices économiques pour les territoires qui investissement dans ce secteur d’activités éminemment transversal.
“1€ d’argent public = 7,6€ de retombées” directes pour les caisses du territoire d’accueil des entreprises de fabrication de contenus cinématographiques/audiovisuels/numériques, annonce fièrement le dossier de presse officiel.
Complétons en surenchérissant : contrairement au cas de l’accueil de tournage de grosses productions (finalement assez rares, comme Les trois mousquetaires) qui génèrent des retombées immédiates, très localisées et provisoires, l’implantation d’un studio d’animation entraîne des retombées bien plus importantes (entre 10 et 14 € pour 1€ investi), durables puisqu’il s’agit là d’emplois, d’impôts et de charges inhérentes, bénéficiant au territoire d’implantation, emplois difficilement délocalisables.

Si cette annonce ne peut que réjouir les ardents promoteurs de la filière artistique et économique globale de la création animée (cinéma, série, VFX, jeux vidéos), elle nous laisse un petit goût amer au constat de l’absence totale de projets normands au tableau d’honneur de la “Grande fabrique de l’image”. Laquelle constitue , selon les mots de Mme Abdul-Malack « la relève du cinéma, de la création audiovisuelle et numérique que nous sommes en train de créer ! Cette relève va se déployer dans douze régions, autour de pôles d’excellence pour les tournages, la production numérique et la formation, qui seront vecteurs d’attractivité, d’emploi et de dynamisme, tout en étant vertueux sur le plan écologique. Notre ambition est d’élargir et de diversifier le vivier de talents, aussi bien créatifs que techniques, de développer les compétences de la filière et d’offrir à la jeunesse l’opportunité de porter de nouveaux récits pour nourrir nos imaginaires. »
Il sera toujours temps de redresser la barre, pour “France 2060” 😉

 

 

Appel à projets : “Premières pages”

Belle initiative en Pays de Loire, avec le lancement d’une nouvelle collection de premiers films d’animation, “Premières pages”.
Il s’agit de reprendre le concept “En sortant de l’école“, porté pendant plus de dix ans par la société de production Tant Mieux Production et France Télévision, pour “faire la courte échelle (scala) aux jeunes talents issus des écoles.
Ce projet renforce un écosystème artistique régional déjà très dynamique reliant notamment Fontevraud (“Les chemins de la création“, diverses résidences de création artistique), Angers (NEF Animation, le festival “Premiers plans” et une nouvelle société de production coopérative ScalaÉ) et Nantes (L’incroyable Studio).

Pour télécharger l’appel à projets “Premières pages”