
Embouteillages, ce n’est que le début
Les plus jeunes d’entre vous, qui s’intéressent professionnellement à la création animée, le savent déjà, quantité d’influenceurs sérieux et autres “coaches” à distance s’activent sur les réseaux sociaux et prodiguent des analyses pertinentes et de précieux conseils, en particulier à destination des néo- et aspirants professionnels désireux de faire carrière dans le cinéma d’animation, les jeux vidéos ou les effets visuels numériques, voire les trois en même temps.
Un récent post de Jérémy Trilles, animateur 3D et formateur en région Auvergne-Rhône-Alpes, a brillamment résumé les données du contexte actuel, caractérisé par un déséquilibre inquiétant entre le nombre de studios de fabrication présents sur le territoire national et le nombre d’établissements de formation.
Cette synthèse fait écho à la tribune adressée en avril dernier aux ministères du travail et de l’enseignement supérieur, ainsi qu’à France Compétences par l’association TeamAnim (filière animation/jeux vidéos en A.R.A).
Si le résumé à gros traits que nous reproduisons ci-dessous (en l’explicitant a minima pour les néophytes) est alarmiste, il a le mérite de vulgariser l’un des enjeux majeurs de tout une industrie créative tiraillée entre des choix stratégiques contradictoires et possiblement porteurs de sa propre perte.
Cette industrie que le monde nous envie n’est pas condamnée à foncer dans le mur. Il va probablement falloir appuyer sur le frein (le plus tôt sera le mieux), changer de modèle de développement (facile à dire), écouter les lanceurs d’alerte argumentée, lesquels expriment rarement des inepties.
“Les stages et alternances en Jeu Vidéo et Cinéma d’animation c’est MORT pour 2024 !
Tu n’as quasiment aucune chance d’en trouver dans ce secteur et je vais t’expliquer pourquoi.
Arrivée massive de demandeurs (de stage, d’alternance)
Il y a environ 50 écoles de 2D/3D en France.
On demande aux 2ème année, 3ème de Bachelor de trouver un stage entre 2 à 6 mois.
Idem, pour les 4ème et 5ème année en Master s’ils ne trouvent pas d’alternance.
4 classes, 4 promo qui sont parachutées pour chercher les même types de stage / alternance.
Il y a environ 15 étudiants par classe.
Au total ça fait… 4 promo x 15 étudiants = 60 étudiants par école
60 étudiants x 50 écoles = 3000 élèves sur le marché du Jeu vidéo / Cinéma d’animation.
On parle ici uniquement des promotions artistiques ( Game Art, Art Graphique, Animation )
Réduction de l’offre de la part des studios
La crise actuelle fait qu’il y a moins de productions, donc moins de besoins en recrutement.
Il n’y a pas assez de visibilité à long terme sur les projets pour s’engager à prendre en alternance sur 1 an.
Le soucis étant que former un Junior monopolise un tuteur qui passe moins de temps en production. Donc c’est coûteux et risqué pendant une crise.
Les contraintes fortes des entreprises
Légalement, une entreprise avec moins de 20 employés ne peut accueillir que 3 stagiaires MAX.
Une entreprise avec plus de 20 employés ne peut avoir que 15% de son effectif en tant que stagiaire.
Donc pour 60 employés = 9 stagiaires MAX.
9 stagiaires pour TOUT poste confondu (management, artistique, programmation, etc…).
Tu comprends donc que mathématiquement, même avec 500 entreprises dans le secteur qui acceptent 9 stagiaires chacune (4500 au total sur TOUT type de poste), il est impossible qu’il y ait de la place ne serait-ce que pour la moitié des 3000 étudiants sur le marché, compte tenu des contraintes citées.“
L’heure du bilan
Profitant de l’ouverture du Marché International du Film d’Animation d’Annecy, le Centre National du Cinéma et de l’image animée publie son étude annuelle sur l’état du marché de l’animation.
A lire, en profondeur ou en diagonale, pour comprendre – ou pas – ce qu’il y a à comprendre et prendre – ou pas – les décisions qui s’imposent.
L’anim’ est un long fleuve tranquille
Téléchargeable gratuitement (ici), la version actualisée de l’imposant (350 pages) “Guide de survie” pour les néo-professionel.les de la création animée, conçu par Antoine David et le Pôle Magélis d’Angoulême, est disponible depuis peu.
Simple à lire (gros textes et plein d’images parce que c’est vrai qu’en 2024, lire un livre sans images c’est trop fatigant), relu et approuvé par les organismes en charge du labeur quotidien, ce document est d’utilité publique.
Carte des aides territoriales à l’animation 2023
Coucou, revoilou notre carte schématique des aides à l’animation, réalisée à partir des données publiées par l’agence du cinéma et de l’audiovisuel de Centre Val de Loire, Ciclic, dans son “Panorama annuel des interventions territoriales” !
Depuis notre précédente infographie en 2021, l’eau a coulé sous les ponts et, le moins que l’on puisse dire, est que la Normandie s’étant dotée d’une aide spécifique au développement de projet animé, laquelle – directement ou indirectement – stimule les productions normandes, notre région va pouvoir (enfin) bénéficier des retombées économiques directes (en emplois surtout) générées ailleurs en France par la création animée.
La consultation de ces données croisées, fait notamment apparaître deux anomalies. L’une, très négative, est le spectaculaire désengagement de la région Auvergne Rhône-Alpes dans le financement du cinéma et de l’audiovisuel par rapport aux années précédentes.
L’autre, très positive, est le soutien remarquable et mérité (140k € sur un fonds d’aide global de 295k € fléché vers l’animation) à “Nouvelle Page”, l’exemplaire projet de série porté par la société coopérative, Scalae Productions.
Vite des émules !
Concernant la Normandie, le passage inédit d’un timide soutien moyen annuel, tournant jadis autour des 30k € (0€ en 2019 et 2021), à 390 000 € aujourd’hui, est dû spécifiquement aux projets de long métrage de Sylvain Chomet et de la première série pre-school à laquelle sont associés des professionnel.les normand.es. Les détails sur cette page.

Santé ou business ?
Si vous doutiez encore de la fonction principale des séries animées à la télé, le récent communiqué de lobbying signé conjointement par AnimFrance et la SACD, vous explique.
Pendant ce temps-là à Marseille…
…non seulement on débat de l’avenir contraint de l’imagerie dynamique mais on le fait en école régionale des Beaux-Arts, milieu au sein duquel l’apprentissage de la création animée est quasiment inexistant en France. Ceci expliquant sans doute cela.
> Les Milieux associés
Pendant ce temps-là à Annecy
Alors que tous les regards s’apprêtent à se focaliser sur le Festival de Cannes (où la représentation du cinéma d’animation n’a jamais été aussi importante, soit dit en passant), prenez donc quelques minutes – à partir de la 25e de cette émission – pour voir ou écouter les propos limpides de Véronique Encrenaz, responsable du Marché International du Film d’Animation (MIFA), adossé depuis près de 40 ans au Festival International du Film d’Animation d’Annecy (lequel a dépassé la soixantaine, rappelons-le).
Par le prisme du projet annécien, vous découvrirez peut-être, avec la naïveté touchante du patron d’Allociné, la réalité d’une filière englobante, économiquement puissante, hybridée, transversale, transmédiatique, dont Annecy se prépare patiemment à devenir ni plus, ni moins que le centre de gravité mondial.
Parmi les enjeux évoqués ici, on notera le développement de la culture de l’animation “adulte” en particulier auprès des distributeurs et exploitants de salles de cinéma, les insolentes retombées économiques produites sur un territoire par un écosystème industriel de la création animée, l’impressionnante montée en puissance des projets à caractère transmédiatique stimulée significativement par le continent africain (ce qui devrait en étonner plus d’un.e !).
Après avoir ouvert sa compétition aux contenus XR en 2019, en donnant une place conséquente cette année aux jeux vidéos et à la porosité toujours plus prégnantes de ce secteur d’activités avec celui du cinéma, les Festivals et Marchés d’Annecy couvrent désormais à peu près l’entièreté du vaste spectre des Industries Culturelles Créatives.
A bons entendeurs…
RADI-RAF 2023, synthèse, etc.
La prochaine édition des Rencontres Animation Développement Innovation (augmentée cette année d’une demi-journée) et des Rencontres Animation Formation se déroulera à Angoulême du 19 au 22 novembre 2024.
• Si vous ignorez encore en quoi consistent ces événements incontournables, rendez-vous sur cette page.
• Pour lire la synthèse de l’édition 2023, c’est ici.
• Pour consulter/télécharger les diaporamas (pdf) illustrant les différentes interventions et autres photos, c’est là.
• Pour visionner les captations vidéos des principales rencontres, tout est sur cette page.
Dernières mises à jour de nos “Ressources”
Vous l’ignorez si vous passez trop brièvement sur le site de Normandie Animation, ce dernier propose différents types de ressources, matérielles ou dématérialisées, accessibles en ligne (voire téléchargeables) ou consultables dans des lieux physiques.
Parmi ces ressources informatives et/ou formatrices, sachez que :
• la page de suivi des aides régionales à l’animation a été actualisée, en intégrant l’ensemble des projets soutenus au titre du fonds d’aides régional au cinéma et à l’audiovisuel.
• Le fonds de documents dédiés à la création animée développé au sein de la médiathèque de l’école supérieure des arts et médias (ésam) de Caen vient d’acquérir les titres suivants :
– L’Odysée de La Planète sauvage de Fabrice Blin et Xavier-Kawa-Topor, beau livre richement illustré consacré au long métrage mythique réalisé en 1973 par Renè Laloux.
– La qualité du cinéma d’animation en question, entre économie et esthétique, ouvrage collectif (fortement conseillé aux étudiants notamment) qui constitue les actes d’un colloque dédié à la question de l’animation complète ou limitée.
– Liens entre films animés, bandes dessinées et livres illustrés, autre ouvrage collectif (actes de colloque lui-aussi) qui rend palpable les transversalités pas si évidentes pour le commun des mortels entre la création animée et ses modes d’expression connexes.
– Le n° 9 de la revue Blink Blank (printemps-été 2024), unique revue francophone dédiée au cinéma d’animation. L’intégralité des numéros de cette publication périodique est consultable gratuitement sur place.