Petite salle clairsemée, militantisme franc du collier et sans pincettes, tonalité générale anarcho-gauchisante anti-néomercantisliste, … On ne s’étonnera donc pas que cette rencontre, organisée en juin dernier en marge des FIFA et MIFA d’Annecy, ait bénéficié de si peu de relais médiatiques (c’est un euphémisme) au-delà du microcosme professionnel concerné par la crue réalité du marché de l’imagerie en France et concrètement engagé pour son évolution progressiste.
Étudiants, étudiantes, parents, parentes, spectateurs, spectatrices, professionnel.le.s de la profession ou néophytes, écoutez attentivement tout ce qui se dit ici (même les gros mots qui disent une colère salutaire), prenez des notes s’il le faut, profitez pleinement de votre chance d’assister enfin, en temps réel, à la mutation – lente, très laborieuse mais inéluctable – d’un monde de Bisounours vers sa maturité culturelle, sociale, économique et politique ! Nuls doutes que vous vous sentirez requinqué.es pour les dix prochains mois après le visionnage de ces 90 minutes de débat pédagogique particulièrement réjouissantes !
Les 18 et 19 octobre prochains se déroulera la 13e édition du rendez-vous incontournable des cinéphiles animavores, préoccupés par la question essentielle de l’écriture du film d’animation. Oui, il y en a ! Le cadre est toujours aussi exceptionnel, le programme toujours aussihors normes, les rencontres/débats/conférences toujours aussi inspirants, les invités toujours aussi prestigieux, le réseautage y est toujours aussi convivial…
Vous le savez maintenant, le quatrième trimestre de l’année est traditionnellement surchargé en sorties de films d’animation, en particulier en octobre. Merci la Fête de l’animation, merci les vacances de la Toussaint et merci Halloween ! Voici une sélection d’œuvres qui n’auront pas nécessairement la visibilité médiatique qu’elles méritent et que nous vous conseillons néanmoins fortement de ne pas louper. La plupart d’entre elles seront notamment programmées en un même lieu (devinez où) lors d’un rendez-nous exceptionnel fin octobre 😉
• Look Back de Kiyotaka Oshiyama est une magnifique histoire d’amitié et d’abnégation artistique, adaptée du manga éponyme de Tatsuki Fujimoto (Chainsaw Man). Ce mélodrame singulier, résolument adressé aux adolescents et aux adultes, devrait passer inaperçu des médias et des publics malgré son esthétique et son scénario quasi-parfaits, en dépit de son animation magistrale et du renversement inattendu qui propulse soudainement le film très loin de la chronique adulescente banale. > sortie en salles uniquement les21 et 22 septembre (bureau des pleurs) > visionner la bande-annonce
• Maya, donne-moi un titre de Michel Gondry célèbre de nouveau le bricolage cinématographique, en l’occurrence l’animation DIY (faite maison, avec les moyens du bord) et démontre brillamment, une fois de plus, que ce n’est pas dans les super-productions luxueuses qu’il faut chercher la créativité débridée et l’essence profonde du cinéma image-par-image. > sortie en salles le 2 octobre > visionner la bande-annonce
• Avec Sauvages, second long métrage du réalisateur de Ma vie de Courgette Claude Barras, celui-ci prolonge son travail autour de la ciné-marionnette (stop-motion) émotive et s’attaque à la fable écologique sur le ton de la comédie familiale. Déforestation, anéantissement du vivant, épuisement des ressources naturelles, désastres collatéraux, tous les bienfaits glorieux des êtres humains (les véritables sauvages ?) y sont condensés pour la plus grande joie de tous les spectateurs, petits et grands. > sortie en salles le 16 octobre > visionner le teaser
• Angelo et la forêt mystérieuse d’Alexis Ducord et Winshluss présentent un récit mainstream, dans la grande lignée des comédies-doucement-horrifiques-américaines-opportunément-exploitées-pour-Halloween. Toutefois, on sera surpris par cette production française hybridée et marquée par l’humour caustique de Vincent Paronnaud (alias Winshluss), fer de lance de la BD punk made in France. > sortie en salles le 23 octobre > visionner la bande-annonce
• Flow est le second long métrage de Gints Zilbalodis. Fort du succès d’Ailleurs (réalisé quasiment seul en 2020), voilà le cinéaste letton et surdoué sur la rampe de lancement vers son orbite stratosphérique imminente, avec une œuvre contemplative, quasi-muette, palpitante, visuellement époustouflante et inspirée. Sans conteste le film d’animation-événement de 2024 ! > sortie en salles le 30 octobre > visionner la bande-annonce
• Bien qu’il ne bénéficie pas (encore) d’une distribution en salles, le documentaire de Brice Vincent consacré à l’écran d’épingles inventé par Alexandre Alexeieff (quoi, vous ignorez qui était ce génie ?!) et aux artistes qui continuent d’en explorer les potentialités artistiques, circulera ça et là, grâce notamment à l’AFCA. > Pourquoi l’écran d’épingles ?
D’ores et déjà, se profilent à l’horizon deux autres longs métrages attendus : • La plus précieuse des marchandises de Serge Hazanavicius (sortie : le 20 novembre) • Slocum et moi de Jean-François Laguionie (sortie : le 29 janvier 2025)
Du 7 au 13 septembre à Trouville-sur-Mer, se déroulera la 25e édition des “Rencontres France-Québec autour du court métrage”, autrement dit du Festival Off-Courts. Parmi les nombreux rendez-vous au programme, quelques films d’animation – français et québécois – en compétition, un atelier permanent et ouvert à tous les publics proposé par l’école Lanimea (“Le monde du cinéma d’animation”) et l’incontournable “jeudi normand” pour réseauter sans entraves avec une grande partie des professionnels du cinéma et de l’audiovisuel de la région.
Normalement, plus personne n’est censé ignorer que 3DVF est l’un des très rares – sinon le seul – média francophone à observer et promouvoir avec expertise les enjeux de l’enthousiasmante et transversale filière de l’imagerie (forcément numérique) et des industries créatives. Son instructif article aux relents de méthode Coué, “Emplois dans l’animation et les effets visuels : après la crise, le rebond ?“, nous donne l’occasion de relayer ici la captation du webinaire “Recherche de stage” que 3DVF a organisé en février dernier autour d’un panel de talent acquisition managers (“responsables de la détection et de l’embauche des talents”, en bon français) représentant quelques têtes de gondole du (super)marché de l’animation et des VFX. Au-delà des réponses et conseils précieux apportés aux futures professionnelles, cette vidéo peut se révéler très instructive pour quiconque – jeunes en phase d’orientation ou parents angoissés par les velléités technico-artistiques de sa progéniture, par exemple – souhaite se forger rapidement une idée de la situation, présente et à venir à court terme. A bons entendeurs.
Pour sa huitième édition., le concours de film d’animation amateur lance aujourd’hui son appel à candidatures inspirées par le mot d’ordre “A FOND !” Les participants ont jusqu’au 30 août 2024 pour envoyer leur création animée (individuelle ou collective, de trois minutes maximum). La cérémonie de remise des prix – “Jeunes Talents”, “Amateurs” et “Confirmés”, prix de Réalisation, du Scénario et de l’Audace – se déroulera le samedi 28 septembre 2024.
> Conditions de participation, détails du règlement et autres infos, ici.
S’il est bien sûr trop tôt pour connaître les retombées économiques des festival et marché internationaux du film d’animation d’Annecy (plus de 19 millions d’euros en 2019 sur une seule semaine), le service après-vente du plus-important-événement-culturel-de-l’univers-dédié-à-la-création-animée-dans-toute-sa-diversité-hybridée publie le bilan de son édition 2024, lequel est plus qu’impressionnant.
Quant à son palmarès, il a le grand mérite de célébrer à juste titre la stop-motion déviante d’Adam Elliot, le talent de Gints Zilbalodis (3D “temps réel” contemplative), les pousses-pieds portugais, la science-fiction féministe, la fraternité face à la calvitie, le chat “uncanny valley” de Pictoplasma, la liberté d’Alfred Nakache, la queerness des carottes. Autrement dit, un excellent cru.
Mais attention au revers de la médaille ! Le rédacteur en chef du média étasunien Cartoon Brew, Amid Amidi (habitué d’Annecy depuis des décennies) publie parallèlement une charge aussi sévère que lucide qui illustre le fait que les limites de cet événement ont probablement été dépassées. Un constat amer en trois points (traduction littérale) : “1. Annecy est victime de son propre succès 2. La connerie des entreprises ruine l’événement 3. Annecy devient un danger de santé publique” Le rabat-joie oublie de préciser que les symptômes qu’il décrit, depuis son lit avec un COVID choppé sur les bords du lac, ont déjà fait fuir pas mal de professionnels depuis le début des années 2000.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, en 2024, les deux secteurs consanguins des industries créatives que son l’édition de livre “jeunesse” et la production de contenus animés s’activent assez peu de manière coordonnée. Le tout récent partenariat entre le programme européen Cartoon Media (lobbying et promotion en faveur de la production industrielle d’animation) et la Foire internationale du livre pour enfants de Bologne (incontournable parmi les Incontournables), à travers son Centre des droits TV/Film conçu pour soutenir le réseautage entre producteurs et éditeurs, symbolise “une puissante synergie entre les secteurs de l’audiovisuel et du livre“.
Reste plus maintenant qu’à faire descendre l’information jusqu’au niveau local, par exemple, au hasard, pour impulser les synergies entre Normandie Livres & Lecture et “Normandie Animation”… 😉